Arzhela, princesse guerrière

Vers l’an 550, les armées bretonnes combattaient vaillamment les francs. Childebert 1er souhaitant, par tous les moyens, agrandir son territoire…

Arzhela, une jeune princesse intrépide, demanda une entrevue à Warroc’h afin de rejoindre comme les princes bretons, celles du roi vannetais. Lors de leur rencontre, le roi refusa aux prétextes qu’elle n’était pas un prince mais une princesse et que surtouL.. elle était une fille et que par conséquent, elle aurait gravement chamboulé les rangs de son armée… Déçue, Arzhela reprit la route, juchée sur sa vieille mule, non sans avoir promis à Waroc’h qu’un jour elle reviendrait et qu’elle irait jusqu’à prendre la tête d’une compagnie…

En chemin, elle se trouva face à une bande de mercenaires. Trois d’entre eux, avaient commencé à provoquer un mendiant à jambe de bois soutenu par une béquille. Arzhela sauta aussitôt de sa mule, attrapa une branche coupée et bondit en direction des trois rustres, bien décidée à leur administrer une volée de coups de bâton. Devant cette arrivée imprévue, les trois mercenaires changèrent aussitôt de cible. L’un d’eux s’écria :

–   Isch des barig *! Un autre répondit:

–   Mei schian *!

Elle n’eut pas le temps de combattre que le tranchant d’une épée fendit son piteux bâton. Sous les encourr.gements du reste de la compagnie amusée du comportement de l’inconsciente demoiselle, les soudards eurent vite fait de maitriser la rebelle. Elle se trouva prisonnière et à la merci de ces mercenaires quand une voix retentit :

–   Laissez-la tranquille !

Le mendiant à la jambe de bois s’était redressé et, comme par enchantement, sa jambe mutilée était réapparue. La béquille et la fausse jambe de bois étaient à ses pieds. Il sortit une épée dissimulée sous son long manteau en peau de mouton. En quelques coups, il mit en pièce la plupart de la bande qui ne demanda pas son reste…

–   Qu’est-ce qui t’a pris de te mêler de ça? tu aurais été certai… Elle interrompit le faux mendiant :

–    Pas du tout ! si vous n’étiez pas intervenu    ..  eh bien, vous auriez vu que j’avais la situation bien en main… on se demande qui se mêle des affaires des autres ! …

–    Après tout, c’est ton problème.

–   Comment vous appelez-vous ?

–   Qu’est-ce que ça peut te faire.

–   Pour savoir, comme ça.

–    Disons qu’on m’appelle Broëroc… tout le monde me connaît… ma réputation dépasse les frontières du royaume.

–   Connais pas ! jamais entendu parler de Boëdoc.

–   Broëroc !

–   Boëdoc ou Broëroc, c’est pareil ! et vous voulez savoir comment je m’appelle ?

–   Ça ne m’intéresse pas!

–   Vraiment, vous n’êtes pas très courtois.

–   Je ne veux pas d’ennuis et puis j’ai rendez-vous.

–   Avec qui ? une autre femme ?

–   Qu’est-ce que ça peut te faire.

–   C’est vrai ! Après tout, ça m’est bien égal. Je demande ça comme ça, Monsieur le susceptible… je vous accompagne.

Broëroc la dévisagea; sa très longue chevelure brune en bataille, balayée par le vent, encadrait son visage poupin. Une fossette, quelques grains de beauté, des lèvres fines à peine dessinées et des joues creuses rosées. Une taille en dessus de la moyenne et ses mains aux longs doigts fins étaient posées sur ses hanches. Elle ne devait avoir guère plus de 15 ans.

–   J’ai autre chose à faire… remonte sur ta mule.

–   Quel goujat!

–   Grimpe sur ta mule, je te dis.

–   Comment vous les avez corrigés, les soudards. Vous voulez bien m’apprendre à me battre?

–   Je n’ai pas le temps.

–   Tout n’est qu’affaire d’argent… Et pour 20 pièces d’or?

–   20 pièces d’or ? tu les prendrais où ?

–   Mon père est très riche ! je suis princesse !

Il releva la tête en ramassant la fausse jambe de bois et la béquille :

–   50 ! payable d’avance.

–   25 l

–   50 ! tu m’as dit que ton père est très riche. Ce dont je doute… je n’ai jamais vu une princesse voyager sur une mule.

Elle haussa les épaules :

–   Va pour 50… mais vous avez intérêt à être à la hauteur l

–   Rendez-vous demain matin au soleil levant sur le pont du Goarh. Vous en jugerez-vous même, Princesse.

–   Demain matin au soleil levant sur le pont du Goarh… entendu ! j’y serai et elle remonta sur sa mule puis se retourna: je m’appelle Arzhela !

 

Et c’est ainsi que commencèrent les aventures d’Arzhela, princesse guerrière…

A  suivre…

 

*Isch des barig ! : marque un grand enthousiasme. *Mei schian ! : Splendide

Texte écrit par Jules Talbot. 2023

 

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